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Tribune: Covid-19: N'oublions pas nos SDF

Dernière mise à jour : 9 mai 2020



“Nous sommes en guerre”, a martelé le président de la République au cours de son allocution télévisée du 16 mars. A chaque guerre ses sacrifiés, aux poilus de 14-18 on peut aujourd'hui comparer une autre population, bien plus silencieuse mais tout aussi vulnérable. En effet, le calcul du gouvernement aboutissant aux mesures ayant “un seul objectif: nous protéger face à la propagation du virus“ ont conduit à l’oubli, malheureusement récurrent, des près de 200 000 (1) personnes sans-abri en France.

Déjà critique, la situation a pris une ampleur nouvelle ce mardi 18 mars avec le début du confinement. Le mot d’ordre aurait dû être “chacun chez soi” pourtant, très vite, le “chacun pour soi” a pris le dessus. La ruée sur les pâtes et le papier toilette ne sont que des exemples navrants des ravages que la peur a pu causer. Beaucoup se sont retrouvés à ne penser qu’à eux, à faire du protectionnisme à l’échelle individuelle, sans beaucoup penser aux plus démunis qui le deviennent encore plus en cette période. A la rigueur, on se souvient de l’existence des grands-parents et on cherche à les aider. Par ailleurs, le gouvernement est prompt à louer le personnel soignant et son combat qualifié à raison d’héroïque. Mais il ne faut pas s’arrêter à cela. Le gouvernement ne peut pas s’arrêter à cela et doit faire montre de générosité envers tout le peuple français, sans laisser quiconque derrière.

Il s’agit là de respecter certains des principes que notre République affiche sur le fronton des mairies à commencer par l’égalité, même devant un virus mais aussi la fraternité qui ne doit pas être ainsi éclipsée par la crise. Nous voulons réaffirmer aujourd’hui ces principes avec vigueur et faire entendre la voix des silencieux.

Les populations des rues pourraient en effet être les premières touchées par une épidémie dont ils sont incapables de s’isoler. Des familles avec enfants, des femmes seules, des hommes abandonnés à eux-mêmes doivent faire face à une crise sur laquelle nous manquons tous d’informations. Ces personnes sont particulièrement vulnérables au virus. La contamination par le Covid-19 est en effet beaucoup plus risquée pour ces personnes dont les mauvaises conditions de vie et l’hygiène accroissent le risque de décès.


Cependant, outre la crise sanitaire qui les menace en premier lieu, ce sont les conséquences indirectes de cette dernière qui risquent de transformer leur situation déjà précaire en une véritable catastrophe. Le confinement imposé et la désertion des rues conduisent à l’absence de dons et à la disparition à une source de revenu essentielle -du moins importante- des personnes sans-abri que sont les dons des passants (2). Une partie des personnes dormant dans la rue survivent également grâce aux dons et à l’aide de diverses associations et à certaines infrastructures. Ces dernières, à qui ils avaient l’habitude de s’adresser, ont drastiquement ralenti voire arrêté leur activité. Déjà le weekend du 8 mars, Les Restos du Cœur ont dû annuler une collecte nationale à cause du virus. Emmaüs a fermé toutes ses boutiques. Les associations, quelle que soit leur taille mais également les organisations étudiantes, les bénévoles, les scouts ne peuvent plus venir en aide aux personnes sans-abri dans une période où elles sont plus isolées que jamais. Il en résulte ainsi que des douches municipales tout comme les infrastructures d’accueil sont fermées et que des centaines de milliers de repas par jour (3) ne sont pas distribués.

Des appels ont déjà été lancés. Des abris se mettent lentement en place, mais il ne s’agit encore que d’initiatives très locales avec un impact bien trop limité. Alors que notre président a pris des mesures pour soutenir les PME, les TPE ou encore les salariés, quand va-t-il agir pour les personnes sans-abri ?


Nous demandons donc:

-La réquisition des bâtiments publics inutilisés afin de loger les personnes sans-abri et leur permettre de se confiner comme le reste de la population

-La formation d’un corps de citoyens volontaires, disposant des moyens de protection nécessaires, afin de distribuer de la nourriture et des produits de première nécessité

-Un accompagnement et une aide financière des associations apportant leur aide aux personnes sans-abri

-La reconnaissance de la priorité des personnes sans-abri pour la réception de gel hydroalcoolique et de masques de protection réutilisables

Nous soutenons toute autre mesure permettant une amélioration de la situation.


Face au covid-19, tous concernés, tous protégés !


  1. Estimations d’associations pour 2019

  2. Selon la Charente Libre (Faire la manche, combien ça rapporte?, 1er Août 2017) un sans-abri peut gagner entre 20 et 50€ pour les bonnes journée

  3. 130 millions de repas sont distribués simplement par les Restos du cœur en 2016-2017 (soit 350 000 repas par jours en moyenne)

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