Le 11 septembre 2001 est considéré comme le point de départ de l'aide aux forces de défense occidentales en Afghanistan. Pendant 20 ans, les troupes occidentales, surtout américaines et allemandes, ont été déployées afin d’aider les civils sur place à se protéger des talibans (1). En 2021, retournement de situation : les troupes se retirent de manière totalement précipitée et le pays est à nouveau livré à lui-même. Le pays a certes été accompagné militairement pendant plus de 20 ans, mais un véritable processus de paix (2), qui aurait pu porter ses fruits et montrer la voie à suivre, n'a jamais commencé si bien que dès le même été, en août 2021, les islamistes étaient de nouveau au pouvoir et reprenaient peu à peu le contrôle de toutes les régions du pays. Les filles et les femmes furent les premières visées par les politiques talibanes. En effet, plus de 20 ans plus tôt, lorsque les talibans étaient au pouvoir pour la dernière fois, elles n'avaient le droit d'aller à l'école que jusqu’à l'école primaire, étaient obligées de porter la burqa et avaient l'interdiction de sortir de chez elles sans être accompagnées d'un homme. Déjà pour des délits aussi minimes que le port de vernis à ongles les doigts étaient coupés.
Il semble que sous le nouveau règne des talibans, même si ces derniers se disent eux même moins radicaux que par le passé, l'Afghanistan balaie tous les succès obtenus au cours des deux dernières décennies et retombe dans les anciens schémas. En effet, leurs actions montrent que les circonstances d'autrefois reviennent lentement. Les femmes n'ont plus le droit de voyager sans un homme de leur famille à l'intérieur ou à l'extérieur du pays et ne peuvent plus se rendre dans les parcs de la ville que certains jours. Les modes de vie alternatifs, comme l'indépendance vis-à-vis de la famille ou l'homosexualité, ne sont pas seulement difficiles, mais tout simplement impossibles. Les médias nationaux se sont vu retirer le droit de diffuser des images de médias étrangers, car ceux-ci ne respecteraient soi-disant pas les valeurs islamiques.
Cette situation dramatique touche particulièrement les jeunes. En effet, l'Afghanistan est l'un des pays au monde où le taux d'analphabétisme est le plus élevé et l'accès aux écoles secondaires est à nouveau interdit aux filles. Après une période de 187 jours, durant laquelle les écoles furent complètement fermées, soi-disant pour tout préparer en vue de la reprise des cours, le ministère de l'éducation, dirigé par les talibans, publia la veille de l’ouverture une déclaration selon laquelle chaque enfant est le bienvenu dans les écoles. Cependant, le lendemain matin, alors que les écoles commençaient à se remplir, toutes les filles furent renvoyées chez elles. Les écoles réservées aux filles ont à nouveau été fermées (3).
Les universités ne sont quant à elles accessibles aux femmes que si elles proposent des cours séparés des hommes (4). Le cercle vicieux qui en résulte se poursuit donc : sans éducation, les femmes n'ont guère les moyens de se rebeller contre les talibans et le blocage de l'accès à l'éducation ne changera guère la situation. Certaines femmes ont néanmoins tenté de s'unir et de s'engager pour les droits des femmes dans le pays : Avec des hashtags sur les réseaux sociaux, elles attirent l'attention et diffusent des histoires de jeunes filles et de femmes. Le #myredline représente la ligne rouge qu'elles ne franchiront pas pour les talibans, par exemple une femme met en avant son stylo rouge qu'elle continuera d'utiliser en tant que journaliste pour faire du journalisme honnête et non censuré. Le #whereismyname a même obtenu une modification de la loi. Jusqu'alors, il n'était pas permis de mentionner le nom d'une femme dans les documents officiels, ni même sur son propre faire-part de mariage ou sur sa pierre tombale. On y lisait toujours "femme de YX", "fille de XY". Sur la carte d'identité figurait le nom du père, mais pas celui de la mère. Ce dernier point au moins avait changé avec la nouvelle loi de septembre 2020. Cependant les talibans ont rapidement montré comment ils traitent les femmes qui tentent de renverser leur système misogyne de cette manière : ils tiennent des listes de décès et des femmes sont déjà exécutées, brûlées ou écorchées quotidiennement. Les journalistes figurent en tête de ces listes (5). Sur place, les personnes concernées expriment aux journalistes occidentaux, lors d'un entretien, qu'elles se sentent oubliées par nous. Le tollé médiatique a été grand lorsque les forces occidentales sont arrivées en Afghanistan il y a plus de 20 ans, et il l'a été également lorsqu'elles en sont reparties et que l'ampleur des conséquences est devenue évidente. Pourtant, quelques semaines plus tard et jusqu'à aujourd'hui, l'intérêt semble avoir radicalement diminué et presque plus personne ne parle de l'Afghanistan et des talibans. D'autres foyers de crise passent au premier plan, l'Afghanistan semble peu à peu oublié. On s'habitue aux crises persistantes et à l'oppression qui n'en finit pas, comme si on les acceptait comme un état normal et qu'on avait tout simplement abandonné les gens sur place.
Franziska Becker
1. https://www.aktion-deutschland-hilft.de/de/fachthemen/news/afghanistan-aktuelle-lage-humanitaere-hilfe/#:~:text=Update%20(25.08.2021),innen%20und%20die%20Vereinten%20Nationen. 2. https://medicamondiale.org/wo-wir-frauen-staerken/afghanistan
3. https://www.dw.com/de/meinung-keine-schule-f%C3%BCr-m%C3%A4dchen-klare-kante-gegen%C3%BCber- den-taliban/a-61305687
4. https://www.tagesschau.de/ausland/afghanistan/taliban-maedchen-schule-101.html
5. https://www.zdf.de/politik/auslandsjournal/afghanistan-taliban-frauen-100.html
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